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Sommaire : Trois questions à Bertrand Braunschweig, président de l'Afia | L'actualité de la semaine | La recherche en pratique | Enseignement | Théories et concepts | Manifestations | Le livre de la semaine
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"On parle beaucoup de l'IA en ce moment, et pas seulement à cause du film"
Asti-Hebdo : Après de mauvaises années, l'IA revient en force. Comment le président de l'Afia explique-t-il ce renouveau ?
Bertrand Braunschweig : C'est vrai qu'il y a eu, dans les années 1990, une légère décroissance et qu'en revanche on entend, aujourd'hui, beaucoup de gens qui en parlent. Et pas seulement à cause du film de Spielberg ! Ils sont attirés surtout par ses nouvelles applications, sa nouvelle présentation ses nouvelles pratiques.
La grande vogue des années 80 se concentrait, en effet, sur une forme particulière d'intelligence artificielle : on tentait de représenter le savoir et les raisonnements des experts dans ce qu'on appelait des systèmes experts. capables de décider par eux-mêmes. Cela n'a pas réussi, en dehors de quelques exceptions, et ceci d'autant plus que ces systèmes étaient conçus comme isolés, fonctionnant même sur des machines particulières (notamment des machines Lisp).
Aujourd'hui, l'IA s'est diversifiée. Elle regroupe aussi bien la modélisation de la connaissance et du raisonnement que les réseaux neuronaux, l'apprentissage, l'évolution artificielle (algorithmes génétiques), la programmation par contraintes et les systèmes multi-agents. La diversité de nos groupes de travail en témoigne. Et nous utilisons les mêmes machines et les mêmes langages que tout le monde (C++ surtout, mais aussi Java ; cependant Prolog et Lisp gardent leurs adeptes).
Hebdo : Malgré tout, l'IA ne reste-t-elle pas isolée ?
B.B. : Bien au contraire. C'est le web qui a donné à l'IA un véritable coup de fouet. Les techniques de fouille de données, de grilles de connaissance, d'apprentissage, de raisonnement, de contenu sémantique... ont été développées depuis de nombreuses années. Mais elles trouvent un essor extraordinaire sur le web, parce qu'on en a besoin pour s'y retrouver dans cette énorme base d'information non structurée. Le web sémantique mobilise toute la communauté IA. Cette démarche est reconnue par tous, et appelle de nouvelles technologies de structuration des connaissances, des ontologies en particulier.
Et non seulement cela fonctionne techniquement, mais les start-ups qui s'y sont consacrées ne mettent pas toutes la clé sous la porte. Pour autant, ne revenons pas aux déclarations hyper-optimistes des années 80 et ne prétendons pas résoudre tous les problèmes.
Plus question, non plus, de développer des systèmes qui règlent tout par eux-mêmes. L'IA et ses techniques de gestion des connaissances et d'apprentissage s'intègrent dans des systèmes plus larges. Elles s'interfacent avec des bases de données, les superviseurs industriels, les réseaux. Elles apportent des algorithmes, voire des composants. Aujourd'hui, il s'agit plutôt de mettre des modules intelligents comme composants au sein d'applications : c'est ce que certains appellent l' "IA cachée".
Il n'y a plus d'environnements de développement généralistes "IA" en tant que tels. Par contre, certaines techniques exigent des environnements particuliers. C'est le cas par exemple de l'évolution artificielle : pour programmer avec des algorithmes génétiques, il faut gérer des populations, faire des croisements, des mutations... des environnements adaptés (mais génériques) sont en cours de développement (notamment à l'Inria, à Polytechnique et au niveau européen). Il en va de même pour les systèmes multi-agents ou la supervision de procédés, qui ont besoin de plates-formes particulières. On trouve des environnements de développement spécifique pour chaque grand domaine de l'IA.
Hebdo : Les hommes n'ont-ils pas changé, eux aussi ? Hier, les spécialistes de l'IA venaient des "sciences dures", de l'algorithmique. Aujourd'hui, la gestion des connaissances, par exemple évoque au moins autant la psychologie et la sociologie que les mathématiques
B.B. : Il n'y a plus une frontière aussi dure qu'autrefois entre ces disciplines. Aujourd'hui l'appartenance au domaine de l'IA peut paraître floue. Celle-ci ne peut être définie uniquement par les techniques utilisées. De nombreuses techniques issues de nos recherches voient leur utilisation démultipliée dans d'autres secteurs. Leur combinaison avec d'autres techniques de l'informatique se rencontre de plus en plus souvent. Les champs d'application sont communs : recherche d'informations sue le web, fouille de données, travail coopératif, robotique, etc.
Parfois même, certaines méthodes ou techniques se rapprochent. Par exemple, l'approche par agents a des points communs avec l'approche par composants du génie logiciel ; l'apprentissage et les réseaux neuronaux avec les statistiques non linéaires ; la fouille avec les entrepôts de données et les technologies Olap ; la programmation par contraintes et la recherche opérationnelle ; les algorithmes génétiques avec le recuit simultané. On pourrait en citer bien d'autres.
Au moment où se font ces rapprochements thématiques, il n'est plus question de considérer que l'Afia est réservée aux tenants de l'IA "traditionnelle" (si l'on peut dire). Nous restons avant tout une communauté d'ingénieurs, mais nous coopérons avec d'autres. Nos groupes de travail, d'ailleurs, sont souvent partagés, en relation avec d'autres communautés.
Les mois qui viennent vont être particulièrement actifs. Le RFIA, déjà bien préparé (la liste des interventions est en ligne sur le web) laisse attendre de bons moments dans la douceur de l'hiver angevin. Et nous travaillons activement au grand événement de l'an prochain, la conférence européenne Ecai, que nous organisons cette année, du 21 au 26 juillet à Lyon.
Pour Transfert "Vie privée, la débâcle continue... La LSQ permet aux "ficheurs" de commercialiser leurs fichiers, les Etats-Unis ne respecteront pas leurs (faibles) engagements en matière de protection de la vie privée, et cherchent à faire pression sur les eurodéputés."
Si l'on pousse à l'extrême, jusqu'à la caricature, le point de vue des syndicats de la recherche publique, on est tenté de leur faire dire : "Toute recherche un peu fondamentale doit être menée par des fonctionnaires titulaires autogérés". Dès lors, seraient a priori considérés comme suspectes ou dangereuses toutes orientations du gouvernement, et a fortiori du monde industriel, qui visent :
- à soumettre la recherche aux orientations souhaitées par les élus de la nation et leurs organes d'action administrative, qualifiés de bureaucrates ou de technocrates ; de ce point de vue, le système des "priorités" mis en avant par le gouvernement apparaît comme inquiétant, et d'autant plus que l'augmentation relative des fonds FNS renforce leurs capacités d'intervention directe ;
- à affecter les ressources disponibles, et les ressources humaines en particulier, autrement que par le maintien du statu quo ou plutôt une croissance homothétique des effectifs et des budgets ;
- à maintenir ou accroître la souplesse des institutions de recherche par des sous-traitances au secteur privé associatif ou par des contrats de durée déterminée, car il s'agit de formes de "précarité" qui doivent être résorbées ; tout appel à des organismes de recherche étrangers est considére comme une inadmissible délocalisation ;
- à mieux contrôler les dépenses des labortoires, car ces contrôles induisent des coûts admnistratifs réduisant d'autant les budgets, ou les heures, disponibles pour la recherche.
Heureusement, les syndicalistes réels que nous avons rencontré(e)s à la conférence de presse annuelle du 7 novembre dernier y ont exprimé des positions beaucoup plus nuancées. Cette réunion, organisée à l'initiative du SNCS, a d'ailleurs le mérite de laisser largement s'exprimer une pluralité de points de vue qui traduit les différentes sensibilités politiques des fédérations aussi bien que les différences sectorielles des différentes catégories de chercheurs, enseignants-chercheurs, étudiants-chercheurs et ITA. On trouvera dans notre dictionnaire la liste des syndicats rassemblés par le SNCS..
Nous ne pouvons ici nous engager dans une analyse différentielle des différentes prises de position syndicales. Un large consensus peut se résumer dans les observations concrètes faites sur le budget, évidemment moins rose qu'il ne le paraît à première lecture. Lecture au demeurant intéressante, et nous rappelons que le texte intégral est disponible en PDF sur le site du gouvernement.
Les syndicats font remarquer :
- que ce budget a été établi sans véritable consultation et qu'une part des instances représentatives n'en a eu connaissance que par la presse
- que l'augmentation globale de 2,2 % ne fait que compenser l'inflation, et qu'il traduit la volonté d'un fonctionnement à moyens constants plus que d'un véritable engagement supplémentaire ; non faute d'efforts de la part du ministère de la Recherche, mais par le refus du ministère des Finances d'aller au delà de ces chiffres ;
- que des études menées par la Communauté européenne font apparaître une faiblesse relative de l'effort français et que ce budget ne la résorbera pas ;
- que le budget fait apparaître de fortes disparités entre les disciplines, les SHS et la physique-chimie pâtissant des accroissements accordés à la génomique, à l'environnement et aux Stic (ce dont, bien entendu, les lecteurs d'Asti-Hebdo peuvent difficilement se plaindre) ;
- que les évolutions d'effectifs annoncées servent pour une bonne part à réduire la précarité, ce qui est excellent mais n'augmente pas les moyens réels des laboratoires
- que le plan décennal de gestion prévisonnelle de l'emploi scientifique n'est pas à la hauteur de l'importante vague de départs en retraite (un tiers des chercheurs) dans quatre ou cinq ans et que ce plan n'est pas une loi de programmation donnant des garanties solides pour l'avenir
- et surtout, que les chiffres présentés ne tiennent aucun compte de l'ARTT ni du fait que l'accroissement du nombre des étudiants (+ 8000 à cette rentrée) pèse sur l'emploi des enseignants-chercheurs. Les effets de la RTT sont estimés par les syndicats à au moins 4000 chercheurs... le déficit étant donc de quelque 3000 chercheurs en tenant compte des emplois créés. Quant aux enseignants-chercheurs, le ministère aurait reconnu un manque d'effectifs s'élevant à 17000, que les syndicats estiment au double.
S'il est un point de consensus entre le ministère et les syndicats, c'est tout de même sur un changement de tendance par rapport aux années antérieures. Pour reprendre les termes du budget : "Depuis 1997, la progression atteint 9,4% contre 3,4% de 1993 à 1997".
Pierre Berger
Nota : Le Conseil supérieur de la recherche et de la technologie a rendu un avis positif sur le projet de BCRD.
Sur l'application du code des marchés publics, le SNCS a voté la motion suivante à son conseil national :
L'application du code des marchés à la recherche publique constitue un handicap croissant pour l'approvisionnement de produits consommables et petits matériels scientifiques. Cette situation conduit à un retard dans les programmes de recherche et à un alourdissement des tâches administratives dans les laboratoires.
Deux possibilités d'évolution positive de cette affaire se font
jour suite aux actions conduites par la communauté scientifique
soutenues par plusieurs organisations syndicales :
- déroger à l'application du code des marchés pour les produits
consommables et les petits matériels scientifiques
- et/ou déconcentrer au niveau des unités de recherche la
passation de ces marchés.
...
Le theme du premier semestre est l'E-formation et le retour en force des technologies de l'information et de la communication dans l'enseignement a travers l'utilisation d'Internet. Les projets de "campus virtuel" se multiplient dans les universités, à l'instar de ce qui se passe aux Etats-Unis. Ces tentatives d'individualiser les formations et de rendre les étudiants autonomes et co-responsables de leurs choix de formation sont-elles une reponse possible a la "crise de l'ecole" ou simplement une n-ieme tentative de certaines entreprises d'investir le secteur de l'education ?
Les réunions, ouvertes à tous se tiennent le deuxième mercredi du mois, de 18h30 a 20h30, dans la salle de conference du GPS, Tour 23-13 (entrer par la 23) 4eme étage salle 11,
Prochaines réunions : 14 novembre. Introduction du thème avec Nicole Bernard ( Lutes. et Pierre-Jean Loiret-Claude ( AUF, Agence universitaire de la francophonie (sous reserve).
12 decembre. La remise en cause de l'institution educative, avec : Alain Chaptal ( CNDP) et Jean-Pierre Archambault (CNDP).
9 janvier 2002. Les accords internationaux sur les services a l'OMC : l'éducation entre les mains des grands groupes multinationaux ? Avec Thomas Lamarche (Revue Terminal) et Jean-Marc Fiorese (groupe Education Attac Nord Essonne)
Comptes-rendus et liens utiles
Un article du Monde (13 novembre 2001) nous montre que le mot "émotion" rejoint maintenant le lexique des technologies : "On est conduit à s'interroger sur la capacité des robots à "ressentir" eux-mêmes des sentiments tels que l'amour, l'affection..." écrivent Michel Albertanti et Hervé Morin.
A bien les lire, on note que ce nouveau développement prend en fait des formes très différentes : - tantôt il s'agit de l'imagination des cinéastes (film AI de Steven Spielberg), - tantôt ce sont des machines conçues pour donner aux humains l'impression qu'elles ont des émotions, et en appeler en retour (chien Aibo de Sony, chat en peluche d'Omron, voir Asti-Hebdo no 48), - tantôt enfin il s'agit réellent de donner aux machines une forme d'émotion, par exemple pour assurer leur propre sécurité ou disponibilité (travaux d'IBM).
Dans le même numéro, Jacques Pitrat, un des pères de l'IA françise, remarque que la question a été formulée dès les débuts de l'IA, et notamment par Marvin Minsky dans The society of mind.
"... l'économique a peu à peu laminé le politique. Les régulateurs mis en place dans nos sociétés pour limiter la prédation que "le fort est en mesure d'infliger au faible" ont été remis en cause... le besoin d'imaginer les régulateurs d'un nouvel ordre mondial s'impoe."
Ce groupe de travail place sa réflexion dans le droit fil de la méthode systémique et de sa pratique trans-disciplinaire.
Ces soirées proposent des projections et la rencontre avec des auteurs, réalisateurs et producteurs d'oeuvres numériques : Patrick Saint-Jean, président de PACMS (et trésorier de l'Asti) se réjouit de l'ouverture désormais plus large de ces soirées : la production cinématographique est rejointe par les sciences, le design, le web et le multimédia. Les thèmes s'élargissent aussi : au delà de la synthèse d'image, ils font leur place aux phases de traitement et analyse.
Prochaines soirées prévues (de 19h à 21h30 (avec entracte) à l'ESIEA, rue
Vésale à Paris) :
- 9 octobre 2001
- 11 décembre 2001
- 5 février 2002 (avant Imagina Monaco)
- 9 Avril 2002
- 11 Juin 2002
On peut trouver sur le site de PACMS la confirmation des dates et le programme de chaque soirée au fur et à mesure de leur élaboration. L'entrée libre pour les membres de l'Asti et des sociétés fondatrices.
Nous avons présenté dans Asti-Hebdp No 35 (rubrique actualités et avec document joint) l'originale projet Simputer, toujours actif.